💌 L’homme qui déposait des poèmes dans les boîtes aux lettres du quartier

Chapitre 1 – Les lettres du matin

Chaque mardi et chaque vendredi, sans exception, les habitants de la rue des Lys trouvaient une enveloppe crème, sans timbre ni adresse, glissée dans leur boîte aux lettres.
À l’intérieur : un poème, court, manuscrit, toujours signé de la même façon :

« De la part de quelqu’un qui vous comprend. »

Très vite, le quartier l’a baptisé « L’Inconnu du matin ».

Chapitre 2 – Dawit, l’homme de l’aube

Personne ne le savait encore, mais cet inconnu s’appelait Dawit. Il avait 81 ans.
Veuf depuis longtemps. Sans enfants. Sans famille proche.
Il vivait seul, tout au bout de la rue, dans une petite maison en pierre que personne ne remarquait vraiment.
Ce silence, cette invisibilité, il les connaissait mieux que quiconque.
Et il savait ce qu’ils faisaient à l’âme.

Il a commencé à écrire pour sauver quelqu’un.
Quelqu’un qu’il ne connaissait pas. Mais qu’il imaginait, quelque part, seul.
Comme lui.

Chapitre 3 – Des mots qui tombent juste

Les poèmes n’étaient pas brillants, mais ils étaient vrais.
Ils parlaient d’absence, de lumière qu’on cache, de chaleur qu’on espère.

Léa, 32 ans, récemment séparée, a trouvé une de ses lettres un matin d’hiver :

« Je ne sais pas qui tu es,
mais je sais ce que c’est,
que d’attendre un regard,
et ne recevoir que le vide.
Tu n’es pas seule. Je veille. »

Elle a pleuré en silence.
Puis elle a respiré un peu plus fort.
Puis elle a souri.
Il y avait quelqu’un. Quelque part. Pour elle.

Chapitre 4 – Un quartier qui se parle

Peu à peu, les lettres de Dawit ont rapproché les gens.
On s’est mis à se parler, à s’échanger les poèmes, à les coller sur les portes.
Certains les encadraient. D’autres en faisaient des signets.

Et toujours, Dawit écrivait.
Depuis sa table de bois, au petit matin, dans le silence de sa cuisine.
Chaque mot posé comme une caresse invisible.

Chapitre 5 – Le grand silence

Un jour, les lettres ont cessé.
Ni mardi. Ni vendredi. Rien.
Pas une enveloppe.

Le quartier a paniqué.
On a sonné aux portes. On a laissé des mots sur les murs :
« Tu vas bien ? Reviens. »

Léa, elle, a simplement écrit :

« Tu m’as tendu la main quand je n’étais plus que chute.
Si tu ne veux plus écrire, sache juste que tu as réussi.
Tu m’as sauvée. »

Chapitre 6 – La dernière lettre

Un matin de mai, une lettre est apparue dans toutes les boîtes aux lettres.
Une seule. La même pour tous. Manuscrite, un peu tremblante.

« Je m’appelle Dawit. J’ai 81 ans.
J’ai écrit pour ne pas sombrer.
Et en écrivant, j’ai trouvé vos cœurs.
Vous m’avez consolé.
Je n’étais plus seul.
J’ai senti vos âmes me répondre.
Alors je peux partir en paix.
Le flambeau d’amour est passé.
Aimez-vous. Tendez la main. Continuez.
Je vous embrasse. »

Chapitre 7 – Héritage silencieux

Dawit s’est éteint quelques semaines plus tard, dans son sommeil.
Paisiblement.
Dans sa maison, on a retrouvé une pile de poèmes jamais envoyés.
Et un petit mot :

« Si un jour quelqu’un veut reprendre la plume… elle est là. »

Léa a recueilli les textes.
Elle a imprimé un petit recueil.
Elle a glissé un poème dans chaque boîte, à son tour.

« À toi, qui lis ces lignes :
Quelqu’un veille peut-être sur toi.
Et si personne ne le fait encore…
Tu peux être ce quelqu’un pour un autre. »